Es-tu brune ou blonde ? Sont-ils noirs ou bleus, Tes yeux ? Je n'en sais rien, mais j'aime leur clarté profonde, Mais j'adore le désordre de tes cheveux. Es-tu douce ou dure ? Est-il sensible ou moqueur, Ton cœur ? Je n'en sais rien, mais je rends grâce à la nature D'avoir fait de ton cœur mon maître et mon vainqueur. Fidèle, infidèle ? Qu'est-ce que ça fait. Au fait ? Puisque, toujours disposé à couronner mon zèle Ta beauté sert de gage à mon plus cher souhait.
Pour la première fois Du côté nord je vois Tourner le carrousel D'un superbe arc-en-ciel.
L'été s'en va. Septembre S'est vêtu d'ambre.
Le soleil en sourdine Active ses turbines Dans une à peine pluie. Ses rayons de bel or Tissent des broderies Du sud au nord. Et c'est pourquoi je vois Pour la première fois La dernière hirondelle Qui fuit sous l'arc-en-ciel.
C’étaient deux petits glaçons qui se croyaient des oursons et, sans craite, ils décidèrent de s’en aller sur la mer... de s’en aller en canot du pôle jusqu’au Congo... Mais le second jour déjà ils avaient perdu leurs bras.. . Le troisième jour, à l’aube... ils avaient perdu leur robe... puis ils perdirent leurs pieds... Pourtant bien emmitouflés le soleil leur faisant fête... leur ôta aussi la tête... Ils étaient presque sans corps lorsqu’un grand vent de tempête les repoussa vers le nord. Ils retrouvèrent leur corps... puis leur pieds, leur bras, leur robe, si bien qu’un beau jour, à l’aube... on revit à l’horizon... Voguer deux petits glaçons... deux petits glaçons tremblants qui se croyaient des ours blancs... Maurice Carème
Ce soir les morts auront des fleurs et des prières.
Oh si les morts pouvaient soulager les vivants !
Eux dorment dans la Paix, l'Amour et la lumière,
Nous gémissons , broyés par l'orage et le vent.
Oh ! S'ils pouvaient parler ! Si de leurs froides tombes,
Leurs voix pouvaient monter, jusqu'à nous les humains,
Nous, si jaloux d'aimer, radieux d'être au monde,
De porter notre âme entre nos mains !
Sous les tombeaux glacés, les stèles funéraires,
A l'ombre des sapins et des saules mouvants,
Tandis que sonneraient les cloches aux voix claires,
Ce soir, ce sont les morts qui plaindraient les vivants.
J.A.
--------
Plus beaucoup de monde encore pour célébrer la Toussaint.
Certes, le port habituel du vase de chrysanthèmes ...
Quand ce n'est pas loin et qu'on a le temps !
S'il n'y avait pas Halloween...
"Cela ne remplace pas aurait dit ma grand-mère.
Dieu a beaucoup d'usines mais hélas plus beaucoup d'ouvriers".
Pour les générations de maintenant, la Toussaint ne veut rien dire, de même que nos petites églises d'autrefois (elle étaient pleines et aujourd'hui elles sont vides).
"Autres temps autres moeurs", disait-on de cela en latin. Mais c'est également perdu...
Tout autant que le cultuel, c'est un part de notre culturel qui f... le camp.
La Légende De Carrouges... Ou La Fée De La Fontaine.... Par...Sami Chaiban
– 1859- Hippolyte Sauvage. Le château de Carrouges est un château du XIV? siècle situé dans la région Normandie, dans le département de l'Orne, sur la commune de Carrouges. Wikipédia
J’ai souvent visité Carrouges. Cette petite ville, qui est la dernière de la Normandie, est située sur le sommet d’une belle colline, au pied de laquelle, à peu de distance, existe un château légendaire, bien connu. L’un de ses magnifiques salons fut occupé par le roi Louis XI, et ses possesseurs actuels ont fait de cette pièce un curieux musée, dans lequel ils montrent avec bonheur les armures et les insignes d’honneur de leurs ancêtres, ainsi que des ornements sacrés, dont le monarque fit hommage au cardinal Le Venneur.
Ce manoir fut construit par le comte Ralph qui avait épousé la comtesse Louise de la Motte, jeune personne du voisinage, douée de toutes les qualités de l’esprit et du coeur. Six années s’étaient déjà écoulées et leur union était toujours restée stérile. Aussi quelle fut la joie du comte quand son épouse lui apprit qu’elle serait bientôt mère!Ralph au comble du bonheur invita tous ses vassaux et les seigneurs voisins à célébrer l’heureuse naissance de l’enfant que la comtesse allait lui donner. Les réjouissances durèrent douze jours, et, comme c’était la coutume, la chasse fut le principal plaisir auquel on se livra.Par une belle matinée d’été, on vit les portes du château s’ouvrir devant les valets et la meute impatiente. Bientôt les seigneurs éperonnant leurs coursiers disparurent dans la forêt voisine, à la poursuite du cerf. Toute la journée les échos des vallons répétèrent alternativement les joyeuses fanfares et les cris animés des chiens.Déjà le soleil commençait à refuser sa lumière et les veneurs se rendaient au château ; le comte seul, emporté par une bouillante ardeur, s’était égaré dans les épaisses futaies. Après avoir parcouru en divers sens les allées de la forêt, il arriva enfin près d’une clairière. C’est une petite vallée bien sauvage et bien fraîche qui semble complètement isolée du reste du monde. Figurez-vous un ravin d’un quart de lieue environ d’étendue, renfermé entre deux collines couvertes de magnifiques arbres; au milieu des deux collines unruisseau, dont les flots se divisent en mille rameaux...Puis se réunissent en un seul canal, qui va marier ses eaux avec celles d’une fontaine ombragée par un massif de saules, et vous aurez une idée de cette clairière. Il faut aller bien loin avant de découvrir une seule habitation, avant d’apercevoir la fumée d’une chaumière, et si rencontrant un homme de la contrée vous lui demandiez le chemin de cette solitude, c’est à peine s’il pourrait vous indiquer l’étroit sentier qui y mène. En arrivant dans ces lieux, le comte entendit les sons mélodieux d’une voix humaine, on eût dit une sirène qui attirait le navigateur par la douceur de son chant; alors il se dirigea vers l’endroit d’où partait cette voix et vit au bord de la fontaine une jeune fille vêtue de blanc.
Curieux de connaître cette étrange beauté, qui venait à cette heure enchanter ce séjour, Ralph descend de sa monture et s’avance vers elle. La belle inconnue sembla ne pas s’être aperçue de la présence de ce nouvel hôte, et elle continua de baigner ses pieds dans l’onde transparente. Le comte, attiré par une force invincible, s’approchait toujours, et quand il fut près d’elle, il tomba à genoux, plongé dans un morne silence. La nymphe de la fontaine se levant alors : « Jeune étranger, dit-elle, d’où te vient cette témérité d’oser troubler cette solitude ? Sache qu’on ne vient point impunément en ces lieux. » Elle tâchait de couvrir sous ces paroles menaçantes la joie qui débordait de son coeur. Ralph effrayé lui répondit... « Déesse de ce séjour enchanteur, ayez pitié d’un voyageur que la nuit a surpris dans la forêt, soyez sensible aux malheurs d’un père, d’un époux. » A peine avait-il parlé que la jeune nymphe, levant ses beaux yeux, lui sourit gracieusement, et tout à coup commença avec lui une danse fantastique ; plus ils dansaient, plus la danse s’animait; leurs pieds ne faisaient qu’effleurer le gazon et pliaient à peine les fleurs qui ornent le rivage. Enfin l’infatigable danseuse l’enlevant de terre se précipita avec lui sous les eaux. L’onde s’agita un instant et reprit bientôt son ancienne tranquillité.
Les ombres luttaient encore avec la lumière, quelques rares étoiles brillaient toujours sur l’azur des cieux ; mais déjà l’orient était couvert d’un manteau d’or et de pourpre lorsque le comte rentra au château. Sur les demandes empressées des seigneurs, il raconta qu’égaré dans la forêt il avait passé la nuit dans la cabane d’un bûcheron. Comme c’était un événement fort commun à cette époque, personne n’en fut étonné et les fêtes recommencèrent avec plus d’ardeur. Chaque soir lorsque tout dormait au château Ralph sortait furtivement, et se rendait au séjour enchanteur de la fée.
Il en fut ainsi pendant plusieurs semaines et personne ne le savait. Mais lorsque la comtesse s’aperçut des absences nocturnes de son époux, de graves soupçons vinrent agiter son âme, et elle résolut d’épier ses sorties. Une nuit que le comte avait, comme de coutume, quitté le château, Louise s’élance de sa chambre, et court sur ses traces. C’était une de ces nuits d’orage qui effraient les campagnes, un vent violent soufflaitdu nord et le tonnerre grondait au sein d’une nue sillonnée d’éclairs. Arrivée à la clairière, la comtesse aperçoit son époux exécuter une danse fantastique avec une jeune fille, revêtue d’un long voile blanc, et s’élancer avec elle dans l’onde de la fontaine. A cette vue la rage s’empare de son coeur, et elle retourne au château, bien résolue de venger l’infidélité d’un époux.
Le lendemain la comtesse se coucha comme de coutume et feignit de savourer un profond sommeil, mais lorsqu’elle vit le comte sortir encore du château, elle saisit un poignard et se dirigea à l’endroit où elle avaitvu la belle fée. La nuit était pure et sereine, l’astre du soir se montrait au-dessus des arbres, apportant avec lui une brise embaumée...Tantôt il suivait sa course azurée, tantôt il reposait sur un groupe de nues ;parfois on le voyait dans les intervalles des grands hêtres, et sa lumière pénétrait dans les plus épaisses ténèbres. Le ruisseau qui coulait avec un doux murmure, tour à tour disparaissait dans les bois, tour à tour reparaissait brillant des feux qu’il reflétait dans son sein. La jeune nymphe reposait au bord de la fontaine ; tout à coup une goutte de sang jaillit de son sein, une autre la suivit, puis une autre, et bientôt sa blanche tunique fut souillée de nombreuses taches sanglantes. Après s’être convulsivement débattue sur le gazon, elle s’élança dans l’onde,en faisant entendre un long gémissement, et tout rentra dans le silence.
Le lendemain matin, on trouva à l’entrée du château le corps du comte étendu sur le sol ; un poignard lui traversait le coeur et près de la blessure on vit un billet sur lequel étaient écrits ces mots...« Je suis vengée. »
Lorsqu’on voulut annoncer à la comtesse la mort de son époux, on la trouva étendue sur son lit et dévorée par une fièvre ardente; mais tout à coup ses suivantes reculèrent d’horreur et sortirent précipitamment en poussant de grands cris. Louise surprise porte instinctivement la main à sa tête et s’aperçoit qu’une tache de sang maculait son front. Cet incident agita tellement son âme, que deux jours après elle était au bord de la tombe. Ce fut dans ces circonstances qu’elle donna le jour à un bel enfant.
Le fils de la comtesse eut six enfants, et tous portèrent au front ce stigmate de punition. Ce n’était d’abord qu’un petit point rougeâtre, puis vers sept ans ce point s’élargissait et ressemblait enfin à du sang. Ce signe distingua pendant sept générations la postérité de la comtesse. Enfin Radolphe, le dernier des Ralph, n’eut qu’une fille. Sans doute la colère de la fée était apaisée; aucune trace sanglante ne souilla le front pur de cette enfant.
Si l’on en croit la tradition, cette localité aurait reçu le nom de Carrouges, pour rappeler la triste punition qui avait pendant si longtemps affligé l’illustre famille des Ralph, et le mot Carrouge signifierait chair ensanglantée (caro chair, rubra rouge).Souvent, disent les habitants de Carrouges, l’on a vu la jeune comtesse, ornée d’un voile noir, venir au pied d’un vieux hêtre pleurer son crime. Si vous interrogez les habitants du voisinage, ils vous diront aussi que, fréquemment ils ont aperçu, par une tiède nuit d’été, la belle fée sur le bord de la fontaine, revêtue d’une tunique ensanglantée.
Recueil : Chansons pour elle (1891).
Es-tu brune ou blonde ?
Sont-ils noirs ou bleus,
Tes yeux ?
Je n'en sais rien, mais j'aime leur clarté profonde,
Mais j'adore le désordre de tes cheveux.
Es-tu douce ou dure ?
Est-il sensible ou moqueur,
Ton cœur ?
Je n'en sais rien, mais je rends grâce à la nature
D'avoir fait de ton cœur mon maître et mon vainqueur.
Fidèle, infidèle ?
Qu'est-ce que ça fait.
Au fait ?
Puisque, toujours disposé à couronner mon zèle
Ta beauté sert de gage à mon plus cher souhait.
Paul Verlaine.
Je dirai au soleil de faire de l'ombre pour toi
Je dirai à la pluie de ne plus tomber sur toi
Je dirai à la lune de tout éclairer pour toi
Je dirai à l'automne de renverser le temps pour toi
Je dirai à l'été de bronzer pour toi
Je dirai au printemps de te transformer en rose pour moi
Je dirai à l'hiver de ne me réveiller que dans tes bras.
Chakib
Les images sont de moi Jackie
Que sont mes dimanches d’hiver de ma jeunesse ?
Beaucoup de souvenirs refont surface pour ma plus grande joie…
J’ouvre ma boite aux trésors !
Je retrouve à l’intérieur des éléments qui a fait mon bonheur.
Habituellement, quand il ne fait pas trop froid, on va patiner en famille…
Autrefois, il y avait beaucoup de patinoires extérieures.
C’est une belle façon de faire de l’exercice…
Ces réunions de famille sont un vrai cadeau
Le soir après le souper,
On se retrouve toujours ensemble…
Les dimanches au soir sont un temps propice aux réunions de famille…
Quand on ne peut pas aller dehors parce qu’il fait trop froid ou qu’il y a une tempête,
On se réunit autour d’un bon feu qui crépite dans le foyer.
Il fait chaud, on est bien !
Ensemble, on chante tous en cœur
On est heureux, c’est le paradis…
Je suis reconnaissante à la vie pour cette époque…
On pouvait se réunir et s’amuser et ainsi développer l’esprit de famille…
©Copyright Lise Gingras
Pour la première fois
Du côté nord je vois
Tourner le carrousel
D'un superbe arc-en-ciel.
L'été s'en va. Septembre
S'est vêtu d'ambre.
Le soleil en sourdine
Active ses turbines
Dans une à peine pluie.
Ses rayons de bel or
Tissent des broderies
Du sud au nord.
Et c'est pourquoi je vois
Pour la première fois
La dernière hirondelle
Qui fuit sous l'arc-en-ciel.
jean-yves roy
Les deux petits glaçons...
C’étaient deux petits glaçons
qui se croyaient des oursons
et, sans craite, ils décidèrent
de s’en aller sur la mer...
de s’en aller en canot
du pôle jusqu’au Congo...
Mais le second jour déjà
ils avaient perdu leurs bras.. .
Le troisième jour, à l’aube...
ils avaient perdu leur robe...
puis ils perdirent leurs pieds...
Pourtant bien emmitouflés
le soleil leur faisant fête...
leur ôta aussi la tête...
Ils étaient presque sans corps
lorsqu’un grand vent de tempête
les repoussa vers le nord.
Ils retrouvèrent leur corps...
puis leur pieds, leur bras, leur robe,
si bien qu’un beau jour, à l’aube...
on revit à l’horizon...
Voguer deux petits glaçons...
deux petits glaçons tremblants
qui se croyaient des ours blancs...
Maurice Carème
Toussaint
------
Ce soir les morts auront des fleurs et des prières.
Oh si les morts pouvaient soulager les vivants !
Eux dorment dans la Paix, l'Amour et la lumière,
Nous gémissons , broyés par l'orage et le vent.
Oh ! S'ils pouvaient parler ! Si de leurs froides tombes,
Leurs voix pouvaient monter, jusqu'à nous les humains,
Nous, si jaloux d'aimer, radieux d'être au monde,
De porter notre âme entre nos mains !
Sous les tombeaux glacés, les stèles funéraires,
A l'ombre des sapins et des saules mouvants,
Tandis que sonneraient les cloches aux voix claires,
Ce soir, ce sont les morts qui plaindraient les vivants.
J.A.
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Plus beaucoup de monde encore pour célébrer la Toussaint.
Certes, le port habituel du vase de chrysanthèmes ...
Quand ce n'est pas loin et qu'on a le temps !
S'il n'y avait pas Halloween...
"Cela ne remplace pas aurait dit ma grand-mère.
Dieu a beaucoup d'usines mais hélas plus beaucoup d'ouvriers".
Pour les générations de maintenant, la Toussaint ne veut rien dire, de même
que nos petites églises d'autrefois (elle étaient pleines et aujourd'hui elles sont vides).
"Autres temps autres moeurs", disait-on de cela en latin. Mais c'est également perdu...
Tout autant que le cultuel, c'est un part de notre culturel qui f... le camp.
J.A
La puce à l'oreille
Je me promène
Dans cette rue sinusoïdale
Dont je n'entends pas la fin
Une alerte interne
Sur fonds d'écoute racoleuse
Via ce chemin des ondes
Je ne reste pas sourd à cet appel
J'entends cette voix
A travers les écouteurs
Appeler au secours
Tout mon être en écho
Le Bluetooth connecté
Je suis sur écoute
Appel d'urgence déclenché
Cela ne fait plus aucun doute
"Oui" fit l'interlocuteur
"T'es où ...?"
"Si loin et si prêt de toi à la fois..."
"Sauve-moi...!"
Le partage de la connexion
Dans ce monde de notifications
Ce réseau cellulaire en doublon
Me donne le tournis , j'en vomis
Je tombe , je n'ai plus de réseau
Et surtout plus de raison
Apprivoisé par cette petite voix
Emprisonné tant elle m' aliène
Je m'évade , je m'enfuis
Ma messagerie en exil
Je jette mon smartphone aux orties
Prière de ne plus déranger !
Thierry PETIBON
Recueil le chemin
Le rideau tombe sur ce jour,
Le jour vécu est déjà passée,
L'amour donné, les émotions,
L’Attention dévoué, l’écoute prêté,
Les rêves cultivés,
Sont déjà des souvenirs.
Demain commence une nouvelle aventure
avec ses espoirs,
Avec ses événements,
Avec ses émotions
Et la vie continue.
Ou La Fée De La Fontaine....
Par...Sami Chaiban
– 1859- Hippolyte Sauvage.
Le château de Carrouges est un château du XIV? siècle situé dans la région
Normandie, dans le département de l'Orne, sur la commune de Carrouges. Wikipédia
J’ai souvent visité Carrouges. Cette petite ville, qui est la dernière de la Normandie, est située sur le sommet d’une belle colline, au pied de laquelle, à peu de distance, existe un château légendaire, bien connu. L’un de ses magnifiques salons fut occupé par le roi Louis XI, et ses possesseurs actuels ont fait de cette pièce un curieux musée, dans lequel ils montrent avec bonheur les armures et les insignes d’honneur de leurs ancêtres, ainsi que des ornements sacrés, dont le monarque fit hommage au cardinal Le Venneur.
Ce manoir fut construit par le comte Ralph qui avait épousé la comtesse Louise de la Motte, jeune personne du voisinage, douée de toutes les qualités de l’esprit et du coeur. Six années s’étaient déjà écoulées et leur union était toujours restée
stérile. Aussi quelle fut la joie du comte quand son épouse lui apprit qu’elle serait bientôt mère! Ralph au comble du bonheur invita tous ses vassaux et les seigneurs voisins à célébrer l’heureuse naissance de l’enfant que la comtesse allait lui donner. Les réjouissances durèrent douze jours, et, comme c’était la coutume, la chasse fut le principal plaisir auquel on se livra. Par une belle matinée d’été, on vit les portes du château s’ouvrir devant les valets et la meute impatiente. Bientôt les seigneurs éperonnant leurs coursiers disparurent dans la forêt voisine, à la poursuite du cerf. Toute la journée les échos des vallons répétèrent alternativement les joyeuses fanfares et les cris animés des chiens. Déjà le soleil commençait à refuser sa lumière et les veneurs se rendaient au château ; le comte seul, emporté par une bouillante ardeur, s’était égaré dans les épaisses futaies. Après avoir parcouru en divers sens les allées de la forêt, il arriva enfin
près d’une clairière. C’est une petite vallée bien sauvage et bien fraîche qui semble complètement isolée du reste du monde. Figurez-vous un ravin d’un quart de lieue environ d’étendue, renfermé entre deux collines couvertes de
magnifiques arbres; au milieu des deux collines unruisseau, dont les flots se divisent en mille rameaux... Puis se réunissent en un seul canal, qui va marier ses eaux avec celles d’une fontaine ombragée par un massif de saules, et vous aurez une idée de cette clairière. Il faut aller bien loin avant de découvrir une seule habitation, avant d’apercevoir la fumée d’une chaumière, et si rencontrant un homme de la contrée vous lui demandiez le chemin de cette
solitude, c’est à peine s’il pourrait vous indiquer l’étroit sentier qui y mène. En arrivant dans ces lieux, le comte entendit les sons mélodieux d’une voix humaine, on eût dit une sirène qui attirait le navigateur par la douceur de son chant; alors il se dirigea vers l’endroit d’où partait cette voix et vit au bord de la fontaine une jeune fille vêtue de blanc.
Curieux de connaître cette étrange beauté, qui venait à cette heure enchanter ce séjour, Ralph descend de sa monture et s’avance vers elle. La belle inconnue sembla ne pas s’être aperçue de la présence de ce nouvel hôte, et elle continua de baigner ses pieds dans l’onde transparente.
Le comte, attiré par une force invincible, s’approchait toujours, et quand il fut près d’elle, il tomba à genoux, plongé dans un morne silence. La nymphe de la fontaine se levant alors : « Jeune étranger, dit-elle, d’où te vient cette témérité d’oser troubler cette solitude ? Sache qu’on ne vient point impunément en ces lieux. » Elle tâchait de couvrir sous ces paroles menaçantes la joie qui débordait de son coeur. Ralph effrayé lui répondit... « Déesse de ce séjour enchanteur, ayez pitié d’un voyageur que la nuit a surpris dans la forêt, soyez sensible aux malheurs d’un père, d’un époux. » A peine avait-il parlé que la jeune nymphe, levant ses beaux yeux, lui sourit gracieusement, et tout à coup commença avec lui une danse
fantastique ; plus ils dansaient, plus la danse s’animait; leurs pieds ne faisaient qu’effleurer le gazon et pliaient à peine les fleurs qui ornent le rivage. Enfin l’infatigable danseuse l’enlevant de terre se précipita avec lui sous les eaux. L’onde s’agita un instant et reprit bientôt son ancienne tranquillité.
Les ombres luttaient encore avec la lumière, quelques rares étoiles brillaient toujours sur l’azur des cieux ; mais déjà l’orient était couvert d’un manteau d’or et de pourpre lorsque le comte rentra au château. Sur les demandes empressées des seigneurs, il raconta qu’égaré dans la forêt il avait passé la nuit dans la cabane d’un bûcheron. Comme c’était un événement fort commun à cette époque, personne n’en fut étonné et les fêtes recommencèrent avec plus d’ardeur. Chaque soir lorsque tout dormait au château Ralph sortait furtivement, et se rendait au séjour enchanteur de la fée.
Il en fut ainsi pendant plusieurs semaines et personne ne le savait. Mais lorsque la comtesse s’aperçut des absences nocturnes de son époux, de graves soupçons vinrent agiter son âme, et elle résolut d’épier ses sorties. Une nuit que le comte avait, comme de coutume, quitté le château, Louise s’élance de sa chambre, et court sur ses traces. C’était une de
ces nuits d’orage qui effraient les campagnes, un vent violent soufflaitdu nord et le tonnerre grondait au sein d’une nue sillonnée d’éclairs. Arrivée à la clairière, la comtesse aperçoit son époux exécuter une danse fantastique avec une jeune fille, revêtue d’un long voile blanc, et s’élancer avec elle dans l’onde de la fontaine. A cette vue la rage s’empare de son coeur, et elle retourne au château, bien résolue de venger l’infidélité d’un époux.
Le lendemain la comtesse se coucha comme de coutume et feignit de savourer un profond sommeil, mais lorsqu’elle vit le comte sortir encore du château, elle saisit un poignard et se dirigea à l’endroit où elle avaitvu la belle fée. La nuit était pure et sereine, l’astre du soir se montrait au-dessus des arbres, apportant avec lui une brise embaumée... Tantôt il suivait sa course azurée, tantôt il reposait sur un groupe de nues ;parfois on le voyait dans les intervalles des grands hêtres, et sa
lumière pénétrait dans les plus épaisses ténèbres. Le ruisseau qui coulait avec un doux murmure, tour à tour disparaissait
dans les bois, tour à tour reparaissait brillant des feux qu’il reflétait dans son sein. La jeune nymphe reposait au bord de la fontaine ; tout à coup une goutte de sang jaillit de son sein, une autre la suivit, puis une autre, et bientôt sa blanche tunique fut souillée de nombreuses taches sanglantes.
Après s’être convulsivement débattue sur le gazon, elle s’élança dans l’onde,en faisant entendre un long gémissement, et tout rentra dans le silence.
Le lendemain matin, on trouva à l’entrée du château le corps du comte étendu sur le sol ; un poignard lui traversait le coeur et près de la blessure on vit un billet sur lequel étaient écrits ces mots... « Je suis vengée. »
Lorsqu’on voulut annoncer à la comtesse la mort de son époux, on la trouva étendue sur son lit et dévorée par une fièvre ardente; mais tout à coup ses suivantes reculèrent d’horreur et sortirent précipitamment en poussant de grands cris. Louise surprise porte instinctivement la main à sa tête et s’aperçoit qu’une tache de sang maculait son front. Cet incident agita tellement son âme, que deux jours après elle était au bord de la tombe. Ce fut dans ces circonstances qu’elle donna le jour à un bel enfant.
Le fils de la comtesse eut six enfants, et tous portèrent au front ce stigmate de punition. Ce n’était d’abord qu’un petit point rougeâtre, puis vers sept ans ce point s’élargissait et ressemblait enfin à du sang. Ce signe distingua pendant sept générations la postérité de la comtesse.
Enfin Radolphe, le dernier des Ralph, n’eut qu’une fille. Sans doute la colère de la fée était apaisée; aucune trace sanglante ne souilla le front pur de cette enfant.
Si l’on en croit la tradition, cette localité aurait reçu le nom de Carrouges, pour rappeler la triste punition qui avait pendant si longtemps affligé l’illustre famille des Ralph, et le mot Carrouge signifierait chair ensanglantée (caro chair, rubra rouge). Souvent, disent les habitants de Carrouges, l’on a vu la jeune comtesse, ornée d’un voile noir, venir au pied d’un vieux hêtre pleurer son crime. Si vous interrogez les habitants du voisinage, ils vous diront aussi que, fréquemment ils ont aperçu, par une tiède nuit d’été, la belle fée sur le bord de la fontaine, revêtue d’une tunique ensanglantée.