L'Âme Rêvée.. Il est une âme enfin que comprend et devine Mon âme ranimée, échappant aux ennuis ; Car mes regards ont vu cette femme divine Que j'avais tant rêvée en mes plus belles nuits. Petits oiseaux, venez près d'elle Et par vos chants et vos baisers, Par vos doux frémissements d'aile Et vos désirs inapaisés, Petits oiseaux, couple fidèle, Portez le trouble en ses pensers.
Ses yeux purs et charmants ont un éclat si tendre Et sa voix pénétrante a des accents si doux, Que les anges du ciel, pour la voir et l'entendre, Descendent empressés et remontent jaloux. Étoile qui fuis dans l'espace, Si tu la surprends quelque soir, Plus rêveuse suivant ta trace De son œil langoureux et noir, Dis-lui que je l'aime, et de grâce Pour moi demande un peu d'espoir.
Pour avoir contemplé sa pâleur éclatante Mon front en gardera le reflet désormais ; Et pourtant je sais bien, languissant dans l'attente, Que son cœur tout à Dieu ne m'aimera jamais. Ô cher objet de mon envie, Au nom si doux à révéler Qu'il est sur ma bouche ravie Sans cesse prêt à s'envoler, Je me tairai toute ma vie, Mais laisse mes yeux te parler.
Espoir pour Demain Souvent nous souhaitons une deuxième chance Pour reprendre à zéro Notre vie mal partie Une chance pour voiler nos erreurs Une chance pour enfin connaître la victoire.
Il suffit de choisir un jour nouveau Pour en faire un début tout neuf Avoir un désir profond Et essayer avec tout notre cœur.
Vivre un peu mieux chaque jour Et toujours pardonner Au monde dans lequel nous vivons.
Ne jamais nous abandonner au désespoir Et penser qu'il y a toujours un lendemain Pour recommencer à nouveau.
La légende du coq de Barcelos, l’histoire d’un horrible crime
L’histoire se passe à Barcelos, une petite ville située au nord du Portugal, du côté de Braga. Un jour, la ville fut frappée par un horrible crime. Je ne saurai vous dire lequel exactement, on parle de meurtre ou d’un vol d’argenterie. De ce fait, les habitants de Barcelos se trouvèrent fort contrariés, d’autant plus qu’ils ne connaissaient ni la raison, ni le coupable. Embarrassés et quelque peu apeurés, les habitants s’empressèrent de désigner quelqu’un. Et pourquoi pas lui, là-bas ? Un pèlerin de passage qui souhaitait se rendre à Saint-Jacques de Compostelle pour exhausser un voeux. Aussitôt dit, aussitôt fait. Il devint le suspect numéro un et sans la moindre preuve, il fut jugé coupable et condamné à la potence. Le pauvre homme eut beau crier au scandale et clamer son innocence, rien n’y fit. Alors il pria très fort Notre Dame, Saint Paul et Saint Jacques pour qu’un miracle survienne et qu’il puisse prouver son innocence.
Et ce qui devait arriver, arriva Son dernier jour arriva et le pèlerin demanda une dernière faveur : qu’on l’emmène auprès du juge avant la fin. Son souhait exhaussé, il fut conduit auprès du magistrat,qui organisait un banquet avec ses amis. Non loin d’être agacé par cette intervention en pleine orgie de victuailles, le juge demanda le silence pour écouter les dernières paroles du pèlerin. L’accusé affirma une nouvelle fois son innocence en vain. Alors dans un ultime élan de désespoir il désigna le coq rôti qui trônait sur la table.
« Il est aussi sûr que je suis innocent, qu’il est sûr que ce coq chantera au moment où l’on me pendra ».
Evidemment, de telles paroles ne purent que déclencher l’hilarité des convives. Et l’agacement du juge par la même occasion qui ordonna :
«Qu’on le pende! »
Le pèlerin fut immédiatement reconduit à la potence. Quand… Devenez quoi ? Le coq se leva et bien sûr, chanta. Le juge se précipita alors jusqu’au condamné pour le libérer. Chose inutile car la corde, pour protéger l’homme innocent, refusait de se serrer. La pèlerin fut immédiatement relâché et put partir en paix. Quelques années plus tard, de retour à Barcelos, il fit construire un monument en hommage à la vierge et à Saint Jacques. Depuis, le Coq de Barcelos est devenu un symbole du Portugal. Un emblème qui représente la morale, la justice et l’optimisme. Belle histoire n’est-ce pas ?
Ce qui est important...... Ton chagrin n'existe que parce que tu t'attaches à l'apparent, tu ne conçois pas ta véritable nature. » « Ne suis-je donc pas une vague ? » « La vague n'est qu'une manifestation transitoire de ta nature. En vérité tu es l'eau. » « L'eau ? » « Oui. Si tu comprends clairement que ta nature est l'eau, tu n'accorderas plus d'importance à ta forme de vague et ton chagrin disparaîtra. » Avoir à l'esprit que l'humanité fait partie d'un ensemble est important. Car l'être humain se considère souvent comme le centre des choses en s'arrogeant des droits particuliers qui n'ont pas de raison d'être. Ainsi il ne voit que chez son prochain ce qu'il n'a pas, sans voir ce qu'il a déjà, et se cause les plus inutiles soucis. Zen
Le coucher de soleil se meurt à l'horizon Ses rayons d'or dans le crépuscule marin Se noient dans les eaux, le ciel d'un bleu profond Prend les couleurs du soir pour renaître au matin. L'astre de nuit a déposé son délicat Voile d'argent sur les bateaux voguant en mer Et admire ses reflets, on entend là-bas Sur terre, L'écho d'un chant au son doux-amer. Au loin sur l'océan, se mire un champs d'étoiles La nature est belle, ce fabuleux décor A permis au peintre de terminer sa toile Et au petit jour, sans aucun bruit, il s'endort.
CRACUS - Légende Historique Non loin de la Vistule on voit encore aujourd'hui une haute montagne, appelée Wavel, dont une des cavernes servait jadis, dans les temps les plus reculés de l'histoire légendaire, de retraite à un dragon qui ravageait le pays, dévorant tout ce qui se trouvait sous ses pas : brebis, chevaux, enfants, les hommes eux-mêmes. Toute la contrée était dans une profonde désolation, et tel était l'effroi de la population, que personne n'osait plus sortir de sa demeure. En vain, on avait tâché de combattre le fléau. Plus d'un songeait à émigrer pour aller chercher ailleurs la sécurité ; mais lorsqu'on se rappelait tous les efforts qu'il avait fallu mettre en oeuvre pour s'établir là, on ne pouvait se décider à quitter ce coin de terre où l'on était né, que l'on avait péniblement défriché à la sueur de son front. Le sol que baigne la Vistule est, au reste, d'une grande fertilité, la terre y donne en abondance des produits de toute nature. Aussi, malgré les maux qu'ils avaient à souffrir, les habitants ajournaient-ils de semaine en semaine leur départ, cherchant ensemble un moyen de défense et de salut. Un jour qu'ils avaient, en assemblée publique, longtemps délibéré sur ce sujet, un d'eux conseilla d'apaiser le monstre en lui offrant quelque proie qui lui fût agréable. "Donnons-lui, dirent-ils, à dévorer chaque année une des plus belles filles du pays." Cette proposition fut d'abord repoussée avec horreur, mais quand on se fut avoué qu'il n'y avait pas d'autres ressources et qu'à ce prix seul on pouvait acheter la tranquillité, on se rangea de cet avis. Il fut donc convenu qu'après les travaux des champs on convoquerait toutes les jeunes filles en un même endroit. Au jour indiqué, elles se trouvèrent au rendez-vous, parées comme pour célébrer la fête de Marzama, déesse à laquelle il était d'usage d'offrir des présents de toute nature afin qu'elle rendît la saison favorable et chassât les fléaux qui pouvaient menacer la contrée. Les vieillards s'étaient assis au pied d'un arbre pour choisir la jeune fille la plus belle. Toutes passaient devant eux, tremblantes d'émotion et croyant qu'on allait donner une couronne à celle qui l'emporterait en beauté sur ses rivales. Rougissantes, baissant la tête, elles défilaient sous les regards des juges. Elles étaient ornées de leurs plus riches vêtements, de leurs plus gracieuses parures, des fleurs dans les cheveux, un collier de perle ou de corail au cou. Le cortège se déroulait lentement. Tout à coup, il y eut une halte. Deux jeunes filles, deux amies, s'étaient arrêtées devant les vieillards. Elles étaient unies depuis leur enfance, partageant leurs jeux et leurs joies, n'ayant point de secrets entre elles. L'une était la fille d'un veuve riche ; l'autre, au contraire, était orpheline, ayant perdu son père et sa mère et n'ayant plus aucun parent. Elles portaient le même costume : un corsage bleu, une jupe plissée, un tablier de couleur voyante. La jeune fille riche avait un collier d'ambre, la petite pauvresse pour toute parure avait enfilé des baies rouges qu'elle s'était attachées au cou. Leur vue éblouit les spectateurs. - Elles sont ravissantes, s'écria l'un des vieillards. Notre choix doit irrévocablement se fixer sur l'une ou l'autre. - C'est d'elles que nous attendons notre salut. Il faut que l'une d'elles se sacrifie au salut de nous tous. Etonnés de ces paroles, Bojenna et Slava, - c'étaient les noms des deux jeunes filles, - demeurèrent un instant interdites, puis, comme si elles obéissaient à un pressentiment, elles voulurent prendre la fuite, mais le plus âgé des vieillards les retint. - Voisins, s'écria-t-il, décidons-nous ; toutes les deux sont également belles, laquelle faut-il choisir ? Il ne se trompait pas. Bojenna était d'une beauté remarquable ; elle avait les yeux noirs grands et brillants, les dents d'une blancheur d'ivoire. Ses cheveux de jais pendaient en longues boucles soyeuses jusqu'à terre. Slava avait les yeux bleus, la chevelure blonde, pareille aux rayons du soleil et retombant en tresses sur ses épaules. Tous les regards se fixaient sur elles, on ne savait à quoi se résoudre. Enfin l'un des assistants dit : - Ne vaudrait-il pas mieux les garder toutes les deux ? Nous les mènerons à l'entrée de la caverne. Le monstre lui-même prendra celle qu'il préfère. Saisies de frayeur, les jeunes filles demandèrent où était cette caverne dont on venait de parler. - Et de quelle caverne peut-il être question, si ce n'est celle du dragon ? répartit un des vieillards. - Mais dans quel dessein voulez-vous nous conduire à cet antre redouté ? disaient-elles d'une voix tremblante, tandis que la pâleur couvrait leur visage effaré. - Nous voulons être affranchis des cruautés du monstre, reprit le vieillard avec autorité. - Et comment espérez-vous, disaient-elles, vous y soustraire. - Nous ne voulons pas qu'il dévore nos bestiaux, répondit le vieillard.
- Mais comment l'en empêcherez-vous ? balbutièrent-elles. - Vous le saurez bientôt. Pour le moment votre devoir est de nous obéir sans nous interroger. Pendant ce temps, les autres jeunes filles avaient continué de défiler et étaient arrivées à un petit bois où elles s'arrêtèrent. La veille on avait fait de nombreux préparatifs pour la fête qui avait lieu aux approches du jour de l'an et au jour même qui correspond à la Noël. La mère de Bojenna avait pris part à ces apprêts. Les gâteaux de miel, les petits cochons de lait, les laitages étaient prêts. Elle n'attendait plus que le retour de sa fille. Mais celle-ci n'arrivait point. Impatiente, elle courut à sa rencontre. Ne la voyant pas, elle allait rebrousser chemin, lorsqu'elle entendit des cris, des lamentations. Il n'y avait pas à en douter : c'était bien sa fille qui appelait au secours. Elle arriva en courant à l'endroit où les deux jeunes filles étaient liées à l'arbre et les trouva tout en larmes. Lorsqu'elle apprit que les deux victimes étaient destinées à être livrées au monstre, elle poussa un grand cri et faillit s'évanouir : - Ma fille ! livrée à ce dragon ! Ah ! périsse le pays plutôt que de laisser commettre ce crime ! Tout en poussant ces exclamations, elle cherchait à défaire les liens, mais sans pouvoir y parvenir. Sur ces entrefaites, le plus âgé des vieillards, après l'issue de la délibération, s'approcha de l'arbre, avec l'intention d'emmener les deux jeunes filles, de les conduire dans sa demeure et les y garder à vue jusqu'au lendemain, puis de les mener à la caverne. La mère s'efforça de lui arracher Bojenna, et n'ayant point d'arme, elle ramassa une poignée de sable qu'elle lança dans les yeux du vieillard. Aveuglé, il ne put résister, mais il essaya de calmer la pauvre femme qui s'était jetée sur lui et lui serrait la gorge des deux mains comme dans un étau. - Je veux que l'on délie ma fille, je l'exige ! criait-elle. Il répondit par un ricanement. - Quel mal lui avons-nous fait ? dit-il. - Quel mal ? Vous voulez la livrer au dragon. - Qui vous l'a dit ? - Vous ne me tromperez pas. Voyant que toute feinte était inutile, il se dit : "Peut-être ferais-je mieux de lui rendre sa fille, aussi bien le monstre ne réclame qu'une seule victime." Puis, s'adressant à la femme : - Mets la main dans ma poche, tu y trouveras un couteau avec lequel tu pourras couper toi-même les liens. Avec une grande précaution, mais sans cesser de se méfier et sans déesserrer l'une des mains qui étranglait le vieillard, elle prit le couteau de l'autre main, puis elle s'élança d'un bond vers l'arbre et en un clin d'oeil les liens de sa fille furent coupés. Avant que le vieillard eût eu le temps de se raviser, elle avait pris la fuite avec Bojenna. - Et Slava ? cria la jeune fille, lançant à sa mère un regard suppliant. Mais sa mère ne l'écoutait pas et l'entraînait. Bojenna, elle-même, dominée par la terreur, se contenta de jeter tristement un regard d'adieu à son amie et se laissa emmener sans résistance. Se voyant délaissée, Slava pleurait. Elle s'était crue si proche de la délivrance et maintenant elle était abandonnée à jamais. Ses pensées se portaient vers son passé, elle songeait à sa mère, à ses soeurs, qui étaient mortes et que sans doute elle allait revoir dans un monde meilleur et cette espérance lui rendait moins cruelle la perspective de la mort. Pendant ce temps, Bojenna et sa mère avaient atteint leur cabane. En voyant leurs larmes et leur frayeur, les femmes et les jeunes filles, attroupées devant l'habitation, les interrogèrent avec anxiété. Alors on apprit le complot des vieillards ; les mères serraient avec effroi leurs enfants sur leur coeur, dans la crainte qu'on ne vînt les leur enlever. - Pauvre Slava ! disait-on. Elle n'a personne qui s'intéresse à elle, personne qui songe à la secourir !
Parmi les jeunes gens mêlés à la foule, il y avait un apprenti cordonnier, nommé Skouba. En entendant ce qui s'était passé, il ne douta pas un seul instant que les vieillards ne missent leur projet à exécution. Il s'empara d'un grand couteau et se dirigea vers l'endroit où la jeune fille attendait le supplice. Mais quelle ne fut pas sa stupéfaction en ne trouvant pas Slava ! Le vieillard l'avait déjà emmenée et enfermée chez lui. Le pauvre Skouba courut à cette demeure. Il se jeta aux genoux du vieillard, et le supplia de donner la liberté à Slava. Mais toutes ses prières furent inutiles. Le vieillard lui déclara qu'il ne pouvait délivrer la jeune fille ; il ne faisait qu'exécuter la volonté du conseil de la contrée ; il ne pouvait refuser d'obéir, sous pein de s'exposer lui-même à la mort sans sauver la victime. Skouba se retira, mais il ne désespéra pas. - Le seul moyen, se dit-il, c'est de tuer le dragon, mais pour accomplir ce dessein, je n'ai d'autre arme que la ruse. Eh bien ! j'y aurai recours. Il imagina alors de prendre une peau de mouton, de la remplir d'arsenic, et de l'offrir au dragon qui la prendrait pour un animal vivant, quand le monstre quitterait au matin sa caverne pour chercher pâture, comme de coutume. Restait à savoir comment Skouba pourrait s'emparer d'un mouton, d'un agneau, et où il trouverait de l'arsenic. Skouba était pauvre, il n'avait aucun argent qui lui permit d'acheter ce dont il avait besoin pour réaliser son projet. - Ah ! se dit-il, à quoi bon imaginer des expédients, si je ne puis les mettres à exécution ! Il demeurait pensif, jetant ses regards autour de lui, quand ses yeux s'arrêtèrent sur une maison qui s'élevait au loin sur une colline. C'était la demeure d'un très bon et très riche seigneur qui s'appelait Cracus et qui s'était établi dans cette contrée avec toute sa famille. A la vue de cette habitation, l'espoir entra dans le coeur de Skouba ; il courut vers la colline et se précipita tout ahuri dans la salle où Cracus se trouvait. Il tomba à genoux et s'écria : - Bon seigneur, secourez l'orpheline ! Si vous ne le faites à l'instant, elle sera dévorée par le monstre. Alors l'apprenti cordonnier raconta brièvement comment la jeune fille avait été garrottée, puis enfermée ; puis il expliqua ce qu'il avait projeté pour faire périr le dragon. Cracus l'écoutait, sans l'interrompre, avec la plus vive attention. Il eut pitié du chagrin du jeune homme et du malheur de toute la contrée, et acquiesça au désir de Skouba. Il ordonna sur le champ à ses gens de tuer un mouton, de le dépouiller de sa peau et de la remplir d'arsenic. Quand cet orde eût été exécuté, l'apprenti cordonnier porta la peau à l'entrée de la caverne du dragon, et ce qu'il avait prévu eut lieu. A peine le monstre fut-il sorti de son antre, qu'apercevant la peau du mouton, il fondit sur la proie et la dévora avec avidité. Bientôt le feu brûla ses entrailles. Il se traîna en rugissant jusqu'au bord de la Vistule, plongea sa gueule dans le fleuve et avala une énorme quantité d'eau. Mais tous ses efforts furent vains. Au bout de quelques instants, l'affreuse bête, qui était naguère la terreur de la contrée, expira. Balayant la terre de sa queue, en proie à une agonie épouvantable, vomissant des flammes, le monstre fut entièrement consumé. Quand les vieillards arrivèrent, conduisant l'infortunée Slava, le dragon était mort. Le pays, pour témoigner sa reconnaissance à Cracus, le prit pour roi. Cracus fit bâtire un château sur la montagne de Wavel qui avait été habitée par le monstre. De nos jours encore on y montre la caverne du dragon. Ensuite Cracus fit construire autour de la caverne une grande ville à laquelle on donna, en mémoire du libérateur, le nom de Cracovie. Cette ville fut la résidence du roi de Pologne. Quant à Skouba, il ne resta pas sans récompense : il épousa la belle Slava.
Il est une âme enfin que comprend et devine
Mon âme ranimée, échappant aux ennuis ;
Car mes regards ont vu cette femme divine
Que j'avais tant rêvée en mes plus belles nuits.
Petits oiseaux, venez près d'elle
Et par vos chants et vos baisers,
Par vos doux frémissements d'aile
Et vos désirs inapaisés,
Petits oiseaux, couple fidèle,
Portez le trouble en ses pensers.
Ses yeux purs et charmants ont un éclat si tendre
Et sa voix pénétrante a des accents si doux,
Que les anges du ciel, pour la voir et l'entendre,
Descendent empressés et remontent jaloux.
Étoile qui fuis dans l'espace,
Si tu la surprends quelque soir,
Plus rêveuse suivant ta trace
De son œil langoureux et noir,
Dis-lui que je l'aime, et de grâce
Pour moi demande un peu d'espoir.
Pour avoir contemplé sa pâleur éclatante
Mon front en gardera le reflet désormais ;
Et pourtant je sais bien, languissant dans l'attente,
Que son cœur tout à Dieu ne m'aimera jamais.
Ô cher objet de mon envie,
Au nom si doux à révéler
Qu'il est sur ma bouche ravie
Sans cesse prêt à s'envoler,
Je me tairai toute ma vie,
Mais laisse mes yeux te parler.
L'âme rêvée. Poète : François-Marie Robert-Dutertre (1815-1898) Recueil : Les loisirs lyriques (1866).
Espoir pour Demain
Souvent nous souhaitons une deuxième chance
Pour reprendre à zéro
Notre vie mal partie
Une chance pour voiler nos erreurs
Une chance pour enfin connaître la victoire.
Il suffit de choisir un jour nouveau
Pour en faire un début tout neuf
Avoir un désir profond
Et essayer avec tout notre cœur.
Vivre un peu mieux chaque jour
Et toujours pardonner
Au monde dans lequel nous vivons.
Ne jamais nous abandonner au désespoir
Et penser qu'il y a toujours un lendemain
Pour recommencer à nouveau.
Hélène Steiner Riz
l’histoire d’un horrible crime
L’histoire se passe à Barcelos, une petite ville située au nord du
Portugal, du côté de Braga. Un jour, la ville fut frappée par un horrible crime.
Je ne saurai vous dire lequel exactement, on parle de meurtre ou d’un vol
d’argenterie.
De ce fait, les habitants de Barcelos se trouvèrent fort contrariés, d’autant plus
qu’ils ne connaissaient ni la raison, ni le coupable.
Embarrassés et quelque peu apeurés, les habitants s’empressèrent de désigner
quelqu’un.
Et pourquoi pas lui, là-bas ? Un pèlerin de passage qui souhaitait se rendre à
Saint-Jacques de Compostelle pour exhausser un voeux. Aussitôt dit, aussitôt fait.
Il devint le suspect numéro un et sans la moindre preuve, il fut jugé coupable et
condamné à la potence.
Le pauvre homme eut beau crier au scandale et clamer son innocence, rien n’y fit.
Alors il pria très fort Notre Dame, Saint Paul et Saint Jacques pour qu’un miracle
survienne et qu’il puisse prouver son innocence.
Et ce qui devait arriver, arriva Son dernier jour arriva et le pèlerin demanda une dernière faveur :
qu’on l’emmène auprès du juge avant la fin. Son souhait exhaussé, il fut conduit auprès du
magistrat,qui organisait un banquet avec ses amis.
Non loin d’être agacé par cette intervention en pleine orgie de victuailles, le juge demanda
le silence pour écouter les dernières paroles du pèlerin.
L’accusé affirma une nouvelle fois son innocence en vain. Alors dans un ultime élan de désespoir
il désigna le coq rôti qui trônait sur la table.
Evidemment, de telles paroles ne purent que déclencher l’hilarité des convives.
Et l’agacement du juge par la même occasion qui ordonna :
Le pèlerin fut immédiatement reconduit à la potence. Quand… Devenez quoi ?
Le coq se leva et bien sûr, chanta. Le juge se précipita alors jusqu’au
condamné pour le libérer. Chose inutile car la corde, pour protéger
l’homme innocent, refusait de se serrer. La pèlerin fut immédiatement
relâché et put partir en paix. Quelques années plus tard, de retour à
Barcelos, il fit construire un monument en hommage à la vierge et à
Saint Jacques.
Depuis, le Coq de Barcelos est devenu un symbole du Portugal.
Un emblème qui représente la morale, la justice et l’optimisme.
Belle histoire n’est-ce pas ?
Dans nos âmes où s'endort le souffle de la vie
Il n'y a que questions sans réponses certaines
Le doute a fait son nid et le sang dans nos veines
Ne véhicule plus ni passion nie envie
Qui prétend que l'aïeul apaisé et ravi
Ressent le fil des jours comme Ariane en aubaine
Sera le plus surpris tant sa démarche est vaine
L'énigme est toujours là sans cesse resservie
Reviendrons-nous ici pour d'autres épisodes
La mort est-elle un port le début d'un exode
Avons-nous tant donné pour que tout disparaisse
Harassés et fourbus nous laisserons à d'autres
La charge du fardeau qui nous fit bons apôtres
Si nous nous endormons ce n'est pas par paresse
Michel RICHARD
Ton chagrin n'existe que parce que tu t'attaches à
l'apparent, tu ne conçois pas ta véritable nature. »
« Ne suis-je donc pas une vague ? »
« La vague n'est qu'une manifestation transitoire de ta nature. En vérité tu es l'eau. »
« L'eau ? »
« Oui. Si tu comprends clairement que ta nature est l'eau,
tu n'accorderas plus d'importance à ta forme de vague et ton chagrin disparaîtra. »
Avoir à l'esprit que l'humanité fait partie d'un ensemble est important.
Car l'être humain se considère souvent comme le centre des choses en
s'arrogeant des droits particuliers qui n'ont pas de raison d'être.
Ainsi il ne voit que chez son prochain ce qu'il n'a pas, sans voir ce qu'il a déjà,
et se cause les plus inutiles soucis.
Zen
Le conte à rebours
Pour remonter le temps
Profitant de chaque instant
J'élabore un plan savant
Pour en apprécier chaque vent
Je revois par mes souvenirs
Les plus beaux de mes sourires
Je perçois dans ma mémoire
Les larmes de mon désespoir
Un visage plein de tendresse
Vient charmer mon allégresse
Une face s'empile , s'efface
Pour ne laisser aucune trace
Le conte à rebours sans cesse
Démonte le temps , insistant
La machine perd de la vitesse
Au détriment des doux moments
Je ne peux plus compter à l'envers
Je ne veux plus regarder en arrière
Laisser à ma pensée libre cours
Ne plus jamais conter à rebours
Thierry Petibon
Chapitre V - La Liberté
Recueil Le Chemin
"Conte à rebours"
= Conte vers une fin déterminée
--> face à ce déterminisme ,
le poète se révolte et se réfugie dans l'intemporel .
Un conte n'est-il pas un récit de faits imaginaires ...
Le coucher de soleil se meurt à l'horizon
Ses rayons d'or dans le crépuscule marin
Se noient dans les eaux, le ciel d'un bleu profond
Prend les couleurs du soir pour renaître au matin.
L'astre de nuit a déposé son délicat
Voile d'argent sur les bateaux voguant en mer
Et admire ses reflets, on entend là-bas
Sur terre, L'écho d'un chant au son doux-amer.
Au loin sur l'océan, se mire un champs d'étoiles
La nature est belle, ce fabuleux décor
A permis au peintre de terminer sa toile
Et au petit jour, sans aucun bruit, il s'endort.
Non loin de la Vistule on voit encore aujourd'hui une haute montagne,
appelée Wavel, dont une des cavernes servait jadis, dans les temps les
plus reculés de l'histoire légendaire, de retraite à un dragon qui
ravageait le pays, dévorant tout ce qui se trouvait sous ses pas :
brebis, chevaux, enfants, les hommes eux-mêmes. Toute la contrée était
dans une profonde désolation, et tel était l'effroi de la population,
que personne n'osait plus sortir de sa demeure. En vain, on avait tâché
de combattre le fléau. Plus d'un songeait à émigrer pour aller chercher
ailleurs la sécurité ; mais lorsqu'on se rappelait tous les efforts
qu'il avait fallu mettre en oeuvre pour s'établir là, on ne pouvait se
décider à quitter ce coin de terre où l'on était né, que l'on avait
péniblement défriché à la sueur de son front. Le sol que baigne la
Vistule est, au reste, d'une grande fertilité, la terre y donne en
abondance des produits de toute nature. Aussi, malgré les maux qu'ils
avaient à souffrir, les habitants ajournaient-ils de semaine en semaine
leur départ, cherchant ensemble un moyen de défense et de salut.
Un jour qu'ils avaient, en assemblée publique, longtemps délibéré sur ce
sujet, un d'eux conseilla d'apaiser le monstre en lui offrant quelque
proie qui lui fût agréable. "Donnons-lui, dirent-ils, à dévorer chaque
année une des plus belles filles du pays."
Cette proposition fut d'abord repoussée avec horreur, mais quand on se fut
avoué qu'il n'y avait pas d'autres ressources et qu'à ce prix seul on
pouvait acheter la tranquillité, on se rangea de cet avis. Il fut donc
convenu qu'après les travaux des champs on convoquerait toutes les
jeunes filles en un même endroit.
Au jour indiqué, elles se trouvèrent au rendez-vous, parées comme pour
célébrer la fête de Marzama, déesse à laquelle il était d'usage d'offrir
des présents de toute nature afin qu'elle rendît la saison favorable et
chassât les fléaux qui pouvaient menacer la contrée. Les vieillards
s'étaient assis au pied d'un arbre pour choisir la jeune fille la plus
belle. Toutes passaient devant eux, tremblantes d'émotion et croyant
qu'on allait donner une couronne à celle qui l'emporterait en beauté sur
ses rivales. Rougissantes, baissant la tête, elles défilaient sous les
regards des juges. Elles étaient ornées de leurs plus riches vêtements,
de leurs plus gracieuses parures, des fleurs dans les cheveux, un
collier de perle ou de corail au cou.
Le cortège se déroulait lentement. Tout à coup, il y eut une halte. Deux
jeunes filles, deux amies, s'étaient arrêtées devant les vieillards.
Elles étaient unies depuis leur enfance, partageant leurs jeux et leurs
joies, n'ayant point de secrets entre elles. L'une était la fille d'un
veuve riche ; l'autre, au contraire, était orpheline, ayant perdu son
père et sa mère et n'ayant plus aucun parent. Elles portaient le même
costume : un corsage bleu, une jupe plissée, un tablier de couleur
voyante. La jeune fille riche avait un collier d'ambre, la petite
pauvresse pour toute parure avait enfilé des baies rouges qu'elle
s'était attachées au cou.
Leur vue éblouit les spectateurs.
- Elles sont ravissantes, s'écria l'un des vieillards. Notre choix doit irrévocablement se fixer sur l'une ou l'autre.
- C'est d'elles que nous attendons notre salut. Il faut que l'une d'elles se sacrifie au salut de nous tous.
Etonnés de ces paroles, Bojenna et Slava, - c'étaient les noms des deux jeunes
filles, - demeurèrent un instant interdites, puis, comme si elles
obéissaient à un pressentiment, elles voulurent prendre la fuite, mais
le plus âgé des vieillards les retint.
- Voisins, s'écria-t-il, décidons-nous ; toutes les deux sont également belles, laquelle faut-il choisir ?
Il ne se trompait pas. Bojenna était d'une beauté remarquable ; elle avait
les yeux noirs grands et brillants, les dents d'une blancheur d'ivoire.
Ses cheveux de jais pendaient en longues boucles soyeuses jusqu'à
terre. Slava avait les yeux bleus, la chevelure blonde, pareille aux
rayons du soleil et retombant en tresses sur ses épaules. Tous les
regards se fixaient sur elles, on ne savait à quoi se résoudre. Enfin
l'un des assistants dit :
- Ne vaudrait-il pas mieux les garder toutes les deux ? Nous les mènerons
à l'entrée de la caverne. Le monstre lui-même prendra celle qu'il
préfère.
Saisies de frayeur, les jeunes filles demandèrent où était cette caverne dont on venait de parler.
- Et de quelle caverne peut-il être question, si ce n'est celle du dragon ? répartit un des vieillards.
- Mais dans quel dessein voulez-vous nous conduire à cet antre redouté ?
disaient-elles d'une voix tremblante, tandis que la pâleur couvrait leur
visage effaré.
- Nous voulons être affranchis des cruautés du monstre, reprit le vieillard avec autorité.
- Et comment espérez-vous, disaient-elles, vous y soustraire.
- Nous ne voulons pas qu'il dévore nos bestiaux, répondit le vieillard.
- Mais comment l'en empêcherez-vous ? balbutièrent-elles.
- Vous le saurez bientôt. Pour le moment votre devoir est de nous obéir sans nous interroger.
Pendant ce temps, les autres jeunes filles avaient continué de défiler et
étaient arrivées à un petit bois où elles s'arrêtèrent. La veille on
avait fait de nombreux préparatifs pour la fête qui avait lieu aux
approches du jour de l'an et au jour même qui correspond à la Noël. La
mère de Bojenna avait pris part à ces apprêts. Les gâteaux de miel, les
petits cochons de lait, les laitages étaient prêts. Elle n'attendait
plus que le retour de sa fille. Mais celle-ci n'arrivait point.
Impatiente, elle courut à sa rencontre. Ne la voyant pas, elle allait
rebrousser chemin, lorsqu'elle entendit des cris, des lamentations. Il
n'y avait pas à en douter : c'était bien sa fille qui appelait au
secours. Elle arriva en courant à l'endroit où les deux jeunes filles
étaient liées à l'arbre et les trouva tout en larmes.
Lorsqu'elle apprit que les deux victimes étaient destinées à être livrées au
monstre, elle poussa un grand cri et faillit s'évanouir :
- Ma fille ! livrée à ce dragon ! Ah ! périsse le pays plutôt que de laisser commettre ce crime !
Tout en poussant ces exclamations, elle cherchait à défaire les liens, mais
sans pouvoir y parvenir. Sur ces entrefaites, le plus âgé des
vieillards, après l'issue de la délibération, s'approcha de l'arbre,
avec l'intention d'emmener les deux jeunes filles, de les conduire dans
sa demeure et les y garder à vue jusqu'au lendemain, puis de les mener à
la caverne. La mère s'efforça de lui arracher Bojenna, et n'ayant point
d'arme, elle ramassa une poignée de sable qu'elle lança dans les yeux
du vieillard. Aveuglé, il ne put résister, mais il essaya de calmer la
pauvre femme qui s'était jetée sur lui et lui serrait la gorge des deux
mains comme dans un étau.
- Je veux que l'on délie ma fille, je l'exige ! criait-elle.
Il répondit par un ricanement.
- Quel mal lui avons-nous fait ? dit-il.
- Quel mal ? Vous voulez la livrer au dragon.
- Qui vous l'a dit ?
- Vous ne me tromperez pas.
Voyant que toute feinte était inutile, il se dit : "Peut-être ferais-je mieux
de lui rendre sa fille, aussi bien le monstre ne réclame qu'une seule
victime." Puis, s'adressant à la femme :
- Mets la main dans ma poche, tu y trouveras un couteau avec lequel tu pourras couper toi-même les liens.
Avec une grande précaution, mais sans cesser de se méfier et sans déesserrer
l'une des mains qui étranglait le vieillard, elle prit le couteau de
l'autre main, puis elle s'élança d'un bond vers l'arbre et en un clin
d'oeil les liens de sa fille furent coupés. Avant que le vieillard eût
eu le temps de se raviser, elle avait pris la fuite avec Bojenna.
- Et Slava ? cria la jeune fille, lançant à sa mère un regard suppliant.
Mais sa mère ne l'écoutait pas et l'entraînait. Bojenna, elle-même, dominée
par la terreur, se contenta de jeter tristement un regard d'adieu à son
amie et se laissa emmener sans résistance.
Se voyant délaissée, Slava pleurait. Elle s'était crue si proche de la
délivrance et maintenant elle était abandonnée à jamais. Ses pensées se
portaient vers son passé, elle songeait à sa mère, à ses soeurs, qui
étaient mortes et que sans doute elle allait revoir dans un monde
meilleur et cette espérance lui rendait moins cruelle la perspective de
la mort. Pendant ce temps, Bojenna et sa mère avaient atteint leur
cabane. En voyant leurs larmes et leur frayeur, les femmes et les jeunes
filles, attroupées devant l'habitation, les interrogèrent avec anxiété.
Alors on apprit le complot des vieillards ; les mères serraient avec
effroi leurs enfants sur leur coeur, dans la crainte qu'on ne vînt les
leur enlever.
- Pauvre Slava ! disait-on. Elle n'a personne qui s'intéresse à elle, personne qui songe à la secourir !
Parmi les jeunes gens mêlés à la foule, il y avait un apprenti cordonnier,
nommé Skouba. En entendant ce qui s'était passé, il ne douta pas un seul
instant que les vieillards ne missent leur projet à exécution. Il
s'empara d'un grand couteau et se dirigea vers l'endroit où la jeune
fille attendait le supplice. Mais quelle ne fut pas sa stupéfaction en
ne trouvant pas Slava ! Le vieillard l'avait déjà emmenée et enfermée
chez lui. Le pauvre Skouba courut à cette demeure. Il se jeta aux genoux
du vieillard, et le supplia de donner la liberté à Slava. Mais toutes
ses prières furent inutiles. Le vieillard lui déclara qu'il ne pouvait
délivrer la jeune fille ; il ne faisait qu'exécuter la volonté du
conseil de la contrée ; il ne pouvait refuser d'obéir, sous pein de
s'exposer lui-même à la mort sans sauver la victime. Skouba se retira,
mais il ne désespéra pas.
- Le seul moyen, se dit-il, c'est de tuer le dragon, mais pour accomplir
ce dessein, je n'ai d'autre arme que la ruse. Eh bien ! j'y aurai
recours.
Il imagina alors de prendre une peau de mouton, de la remplir d'arsenic,
et de l'offrir au dragon qui la prendrait pour un animal vivant, quand
le monstre quitterait au matin sa caverne pour chercher pâture, comme de
coutume. Restait à savoir comment Skouba pourrait s'emparer d'un
mouton, d'un agneau, et où il trouverait de l'arsenic. Skouba était
pauvre, il n'avait aucun argent qui lui permit d'acheter ce dont il
avait besoin pour réaliser son projet.
- Ah ! se dit-il, à quoi bon imaginer des expédients, si je ne puis les mettres à exécution !
Il demeurait pensif, jetant ses regards autour de lui, quand ses yeux
s'arrêtèrent sur une maison qui s'élevait au loin sur une colline.
C'était la demeure d'un très bon et très riche seigneur qui s'appelait
Cracus et qui s'était établi dans cette contrée avec toute sa famille. A
la vue de cette habitation, l'espoir entra dans le coeur de Skouba ; il
courut vers la colline et se précipita tout ahuri dans la salle où
Cracus se trouvait. Il tomba à genoux et s'écria :
- Bon seigneur, secourez l'orpheline ! Si vous ne le faites à l'instant, elle sera dévorée par le monstre.
Alors l'apprenti cordonnier raconta brièvement comment la jeune fille avait
été garrottée, puis enfermée ; puis il expliqua ce qu'il avait projeté
pour faire périr le dragon. Cracus l'écoutait, sans l'interrompre, avec
la plus vive attention. Il eut pitié du chagrin du jeune homme et du
malheur de toute la contrée, et acquiesça au désir de Skouba. Il ordonna
sur le champ à ses gens de tuer un mouton, de le dépouiller de sa peau
et de la remplir d'arsenic. Quand cet orde eût été exécuté, l'apprenti
cordonnier porta la peau à l'entrée de la caverne du dragon, et ce qu'il
avait prévu eut lieu.
A peine le monstre fut-il sorti de son antre, qu'apercevant la peau du
mouton, il fondit sur la proie et la dévora avec avidité. Bientôt le feu
brûla ses entrailles. Il se traîna en rugissant jusqu'au bord de la
Vistule, plongea sa gueule dans le fleuve et avala une énorme quantité
d'eau. Mais tous ses efforts furent vains. Au bout de quelques instants,
l'affreuse bête, qui était naguère la terreur de la contrée, expira.
Balayant la terre de sa queue, en proie à une agonie épouvantable,
vomissant des flammes, le monstre fut entièrement consumé.
Quand les vieillards arrivèrent, conduisant l'infortunée Slava, le dragon était mort.
Le pays, pour témoigner sa reconnaissance à Cracus, le prit pour roi.
Cracus fit bâtire un château sur la montagne de Wavel qui avait été
habitée par le monstre. De nos jours encore on y montre la caverne du
dragon. Ensuite Cracus fit construire autour de la caverne une grande
ville à laquelle on donna, en mémoire du libérateur, le nom de Cracovie.
Cette ville fut la résidence du roi de Pologne.
Quant à Skouba, il ne resta pas sans récompense : il épousa la belle Slava.
I. J. KRASZEWSKI - 1890